Gagner un procès civil n’est pas chose aisée. L’article 9 du Code de procédure civile rappelle qu’il « incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».

La preuve sera donc au cœur des débats, qu’il s’agisse de l’établir ou de la conserver, et ce afin de confronter les faits à la règle de droit.

L’avis technique d’un expert sera parfois indispensable au succès des prétentions. Deux expertises sont envisageables : celle dite « amiable » ou privée (I.) et celle dite « judiciaire » (II.). Quelle mesure choisir entre les deux (III.) ?

1. L’expertise amiable

L’expertise amiable est une mesure d'instruction confiée à un ou plusieurs techniciens hors du cadre judiciaire. Elle peut être organisée par une initiative unilatérale (elle sera dite « officieuse ») ou demandée d’un commun accord par les parties : elle peut également être prévue d’origine par un contrat (fréquente en matière d’assurance).

L’expert désigné n’est pas tenu au respect des règles de procédure civile imposées aux experts judiciaires (cf. infra, II.) : cependant, et notamment lorsque les parties auront conjointement saisi l’expert, ce dernier sera tenu de faire respecter les règles élémentaires en la matière et notamment faire assurer le principe de la contradiction (chaque partie doit être en mesure de discuter les arguments de l’autre).

2. L’expertise judiciaire

L’expertise judiciaire est ordonnée par le juge (notamment le Président du Tribunal judiciaire ou du Tribunal de commerce ou son délégué lorsqu’elle est demandée en référé, le juge ou conseiller de la mise en état lorsque l’instance au fond est déjà introduite).

La décision qui ordonne une mesure d’expertise doit être motivée : elle indique notamment l’expert désigné, sa mission précise, son délai d’exécution, etc…

Le demandeur à l’expertise doit apporter la preuve de l'existence d'un motif légitime de conserver ou d'établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige (sur la pertinence d’une expertise amiable comme preuve d’un motif légitime, cf. infra, III.).

L’expert désigné est inscrit sur une liste tenue par la Cour d'appel ou une liste nationale : il est indépendant et impartial (ce que rappelle l’article 237 du Code de procédure civile) et participe – via l’expertise – à la mission de service public de la justice.

De nombreuses obligations lui sont imposées par le Code de procédure civile : il doit en toute circonstance faire respecter le principe du contradictoire, donner son avis sur les points pour l’examen desquels il a été commis, respecter et faire respecter les délais impartis, répondre aux observations et aux réclamations des parties, dresser un pré-rapport puis un rapport du tout et surtout respecter l’interdiction qui lui est faite de porter des appréciations de droit sur les points qui lui sont soumis.

Autrement dit, et l’article 238 du Code de procédure civile le rappelle, l’expert n’est pas juge mais bien un technicien qui va éclairer le juge.

L’expertise judiciaire se fait sous le contrôle du juge chargé de l’expertise.

3. Quelle mesure choisir entre les deux ?

D'une façon générale, le rapport d'expertise amiable peut être judiciairement reçu à titre de preuve dès lors qu'il a été soumis à la libre discussion des parties (Cass, 3ème civ. 11 mai 2010, n°09-12.235 ).

Cependant, la jurisprudence actuelle est plus restrictive : elle énonce que hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci (Cass, 3ème civ., 14 mai 2020, nos 19-16.278 et 19-16.278).

Il conviendra ainsi de corroborer les conclusions de l’expert amiable avec des éléments extrinsèques (procès-verbal de constat de commissaire de justice, avis techniques, photographies, etc…), ce qui amenuise son efficacité et sa valeur probante.

De plus, dans certains cas (notamment lorsque l’expertise est sollicitée par une seule partie), les Juridictions seront plus réticentes à retenir les conclusions d’un expert dont l’indépendance et l’impartialité pourront de fait être remises en cause.

En conclusion donc, l’expertise amiable n’est pas infaillible même si elle constitue un commencement de preuve incomparable, notamment pour justifier de l’existence d’un motif légitime à solliciter une expertise judiciaire.

L’expertise judiciaire reste donc la voie à privilégier pour maximiser vos chances de succès lors d’un procès futur (ou déjà en cours).

Qu’il s’agisse de la demander ou d’y assister, la présence d’un avocat est indispensable pour toute mesure d’expertise : elle est même obligatoire lorsque l’expertise est sollicitée judiciairement en référé notamment (depuis le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 entré en vigueur le 1er janvier 2020).

Le cabinet de Maître Bertrand Pillet – Avocat à Chambéry sera votre partenaire pour l’accompagnement dans toute mesure d’expertise, qu’elle soit amiable ou judiciaire.

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